par  Antonio Sciacovelli – János Kelemen – Norbert Mátyus

 

La fondation de la Société

La Societé Dantesque Hongroise est née de la collaboration de chercheurs et d’universitaires de différentes disciplines concernées par l’étude de Dante. Un petit comité scientifique composé de quelques amis s’est formé au début de l’année 2002 : professeurs enseignant dans diverses universités hongroises ou italiens passionnés par Dante, ils échangeaient régulièrement le résultat de leurs recherches, jusqu’à ce qu’ils décident de fonder ensemble une société capable de rassembler et d’organiser les nombreuses activités de ses membres. C’est ainsi que la société, composée de 24 membres, fut fondée le 16 février 2004, et enregistrée le 7 avril de la même année auprès du tribunal de Budapest, sous le nom de Magyar Dantisztikai Társaság, Societé Dantesque Hongroise (SDU1). La SDU n’a aucun lien juridique avec une quelconque institution, mais ses membres représentent l’ensemble des départements d’études italiennes des universités hongroises. János Kelemen, académicien et ancien directeur de l’Académie hongroise de Rome, a été élu président de la Société.

Les objectifs de la Société

Les statuts de la SDU définissent deux objectifs principaux. Il s’agit d’abord d’élaborer un commentaire en hongrois de l’ensemble des œuvres de Dante pour le sept centième anniversaire de la mort de Dante, en 2021.

Toutes les œuvres de Dante ont été traduites en hongrois depuis 1965, grâce au travail considérable d’un groupe de travail dirigé par Tibor Kardos2. Mais la traduction ne permet pas au lecteur moderne d’accéder facilement à l’univers dantesque. Il est extrêmement important de pouvoir lire le texte de Dante en hongrois, mais la distance qui nous sépare de Dante sur un plan culturel autant que spirituel ne permet pas une compréhension facile et immédiate du texte, même si celui-ci bénéficie d’une traduction moderne. D’où la nécessité d’accompagner les traductions existantes par un commentaire permettant à la fois de rendre le texte accessible aux lecteurs hongrois et de fournir des éléments et des stratégies interprétatives aux chercheurs. La tradition hongroise des commentaires aux différentes œuvres de Dante est certes ancienne, et on ne peut ici présenter tous les travaux du siècle dernier. On doit cependant insister sur l’importance qu’ils ont pris au cours des dernières décennies3, d’autant plus que les auteurs des études les plus récentes, tout en reconnaissant ce renouveau de la dantologie hongroise, insistent sur l’absence d’une édition scientifique permettant de faciliter la compréhension de l’œuvre4.

Consciente de la nécessité d’un commentaire des œuvres, la SDU a donc décidé d’en assumer la tâche. Ses première séances ont permis de concevoir les différentes étapes de ce projet, en répartissant ses membres dans plusieurs groupes de travail, chacun d’entre eux devant se charger du commentaire à une œuvre. Il ne s’agit pas ici de présenter toutes les règles adoptées pour ce travail exégétique. On se contentera d’exposer rapidement sous quelle forme apparaîtra le futur commentaire de la Divine Comédie (déjà en partie composé). Le principal problème auquel on se heurte lorsqu’on veut élaborer l’appareil critique d’une œuvre poétique écrite dans une langue différente de celle du commentaire est celui de la traduction elle-même. Le lecteur hongrois lit l’œuvre de Dante, ainsi que son commentaire, en hongrois, car il n’a pas accès au texte italien. Il attend cependant que la traduction en hongrois respecte fidèlement le texte de Dante.

Nous savons bien qu’aucune traduction n’est en mesure de rendre toutes les caractéristiques du texte original, et que par conséquent le commentaire d’un texte traduit sera toujours réducteur, un tel commentaire ne pouvant ni expliquer ni commenter les problèmes textuels écartés ou simplement déjà résolus dans la traduction. La qualité scientifique de l’appareil exégétique se trouve ainsi diminuée, d’autant plus qu’il est nécessaire de faire un choix parmi les cinq traductions existantes de la Divine Comédie : cela explique pourquoi on a choisi de commenter en hongrois le texte italien, en l’associant à une nouvelle traduction, en prose, la plus fidèle possible, établie par le commentateur. Le commentaire se réfère ainsi à deux textes de référence, la traduction en hongrois pour les structures narratives et le texte original pour les problèmes d’ordre stylistique ou esthétique.

Après avoir résolu de cette manière le problème du texte de référence, on peut diviser le commentaire de chaque chant de la Divine Comédie en trois sections:

– une introduction présentant le chant sur un plan narratif et interprétatif.

– le texte original accompagné de sa traduction en prose. A signaler que le texte original suit fidèlement l’édition Petrocchi, sans jamais en discuter les choix.

– Le commentaire, qui ne concerne jamais des mots ou des vers isolés, mais toujours des groupes d’au moins deux terzine.

C’est sous cette forme, choisie lors d’une table ronde organisée au siège de l’Ecole Supérieure Dániel Berzsenyi di Szombathely le 8 octobre 2005, que la traduction commentée a semblé la plus conforme au projet initial des fondateurs de la Société, d’autant plus que celle-ci poursuit un autre objectif indissociable de cette activité scientifique et éditoriale, celui de soutenir les jeunes talents.

Activités de la SDU

Parmi les diverses activités et manifestations organisées par la SDU, les plus significatives sont les séances organisées mensuellement, qui donnent l’occasion aux membres et aux chercheurs de présenter leurs recherches sous la forme d’une conférence. Outre ces séances mensuelles régulières, la Société organise chaque année des colloques et des réunions, en collaboration avec d’autres institutions comme L’Institut Culturel Italien de Budapest et l’Académie Hongroise de Rome. Il faut en particulier rappeler un événement à la portée symbolique : le 30 mai 2008 s’est tenu le premier congrès des jeunes dantologues hongrois. La Société a organisé un concours pour la présentation d’un projet fondé sur une activité scientifique ayant pour objet l’étude des éléments littéraires, philologiques, philosophiques et historiques de l’œuvre de Dante, ainsi que de sa réception. A ce concours pouvaient participer des étudiants en master ou préparant un doctorat. Les auteurs des quatre meilleures contributions, choisies par un jury composé de membres de la Société, ont été invités à exposer leurs travaux lors du colloque international mentionné ci-dessus.

La revue de la Société: Quaderni danteschi

Face à l’importance croissante des activités de la Société, il est devenu nécessaire de créer un ou plusieurs instruments permettant de conserver les résultats des nombreuses lectures, conférences et activités de recherche organisées, et de les rendre accessibles au public. C’est ainsi qu’est né un périodique, les Quaderni Danteschi Ungheresi, revue officielle de la Société Dantesque Hongroise. Il s’agit d’une revue semestrielle, même si nous ne sommes pas parvenus jusqu’ici à publier régulièrement deux numéros par an. Le premier numéro a paru à l’automne 2006 chez la Savaria University Press, et nous avons atteint aujourd’hui le nombre de douze fascicules.

En ce qui concerne la langue choisie pour les contributions, on a opté pour un plurilinguisme, une notion qui trouve un écho dans l’œuvre de Dante. Etant donné que la revue est l’expression de la Société Dantesque Hongroise, et afin de ne pas oublier l’objectif que celle-ci s’était fixé, à savoir un commentaire hongrois à une traduction hongroise de Dante, nous avons privilégié cette langue: chaque fascicule comprend en effet un certain nombre de textes en hongrois, accompagnés à chaque fois d’un résumé en italien. Mais vu l’importance du caractère international de la revue, nous publions toujours plus d’articles en italien ou traduits en italien, sans exclure pour autant la langue anglaise – une politique que nous avons suivie dans les numéros publiés jusqu’ici. Tandis que le premier numéro ne présentait qu’un article en italien pour six en hongrois, le second en présentait cinq en italien, un en anglais et un en hongrois. Dans le troisième numéro, cinq articles étaient écrits en italien, quatre en hongrois et un en anglais, et dans le quatrième numéro, quatre articles en italien, deux en hongrois et un en anglais.

(traduit de l’italien par Christophe Libaude)

1 Società Dantesca Ungherese.

2 Dante összes művei, ed. Kardos Tibor, Budapest, Helikon, 1962.

3 Pour les dernières recherches hongroises sur Dante, voir Márton Kaposi, « Magyar Dante-kutatások az ezredfordulón », in Magyar Tudomány, 49, 2004, p. 491-503 et « Ricerche su Dante in Ungheria nel secondo millennio », in L’Alighieri, 2004/24, p. 119-137, ainsi que l’ouvrage bibliographique de Tibor Szabó (Megkezdett öröklét. Dante a XX. századi Magyarországon, Bp., Balassi Kiadó, 2004).

4 Par exemple János Kelemen, A filozófus Dante, Bp., Atlantisz, 2002 ; Imre Madarász, “Költők legmagasabbja”. Dante-tanulmányok, Bp., Hungarovox, 2001; Pál József, Dante. Szó, szimbólum, realzmus a középkorban, Budapest, Akadémiai Kiadó, 2009.

Présentation de la Société Dantesque d’Hongrie